• Bienvenue !

    Les Loges du Pic…

    Je suis tombée dans les livres lorsque j’étais enfant… Je me revois encore plongée entre les lignes, traînant toujours derrière moi un, ou plutôt des ouvrages, au cas où je finisse celui en cours… Je me revois assise sur les marches de l’escalier de notre maison, profitant de la moindre minute disponible pour me replonger dans une lecture.
    Et puis un jour, le carnet, et le stylo se sont associés au livre. J’ai commencé à prendre des notes, à relever des mots, des phrases, des extraits, qui trouvaient en moi un écho particulier et qui m’ont été par la suite un guide, tant dans ma vie que dans ma pensée.

    Au fil des années, les mots, les lignes, les pages se sont alignés pour devenir romans. Si j’aime à m’y replonger de temps à autres, je souhaitais avant tout et depuis longtemps les partager, pour que peut-être, ils trouvent ailleurs un écho, et inspirent à nouveau d’autres existences.

    Ce blog est une manière d’y parvenir.

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    Cette vaine machine.

    « Tout roule ici dans une loi implacable de machine. Et les trains incessants alimentent les foyers. La vie brûle tout le temps dans le corps des habitants de la ville, non plus pour la joie de la flamme mais pour l’utilisation de la flamme. La vie de chacun doit produire, la vie de chacun n’a plus son propriétaire régulier, mais appartient à quelqu’un d’autre, qui appartient à la ville. Une chaîne sans fin d’esclavage où ce qui se produit se détruit sans créer ni joie ni liberté. Alors, à quoi bon ? Mais je suis seul à parler dans la rue et personne ne m’entend. Personne ne peut m’entendre car les hommes et les femmes qui habitent cette ville sont devenus le corps même de cette ville et ils n’ont plus de corps animal et divin. Ils sont devenus les boulons, les rivets, les tôles, les bielles, les rouages, les coussinets, les volants, les courroies, les freins, les axes, les pistons, les cylindres de cette vaine machine qui tourne à vide sous Sirius, Aldébaran, Bételgueuse et Cassiopée. »

    Jean Giono : Les vraies richesses, 1937

  • POÉSIE

    The Summer Day

    Qui fit le monde ?

    Qui fit le cygne et l’ours noir ?

    Qui fit la sauterelle ?

    Je veux dire, cette sauterelle_

    Celle qui a bondi hors de l’herbe,

    Celle qui mange du sucre au creux de ma main,

    Qui bouge ses mandibules de gauche à droite,

    plutôt que de haut en bas_

    Qui regarde autour d’elle avec ses énormes yeux compliqués.

    Maintenant, elle lève ses pâles avant-bras et se nettoie soigneusement la tête.

    Maintenant, elle déploie ses ailes et s’envole au loin.

    Je ne sais pas exactement ce qu’est une prière.

    Je sais comment centrer mon attention, comment tomber dans l’herbe, comment m’agenouiller dans l’herbe, comment flâner et être comblée, comment errer à travers les champs,

    ce que j’ai fait tout au long de la journée.

    Dis-moi ce que j’aurai dû faire d’autre ?

    Est-ce que tout ne finit pas par mourir, trop rapidement ?

    Dis-moi ce que tu entends faire de ton unique, sauvage, et précieuse vie.

    MARY OLIVER

    ‘The Summer Day’ ; House of light ; 1990

    Photo : www.jessicabuczek.com

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    La part sauvage du monde.

    Bison bonasus – Bison d’Europe dans la forêt de Białowieża, en Pologne.

    « Notre pari, c’est que pour reconnaître et respecter la part sauvage du monde, y compris dans ses manifestations les plus quotidiennes, il faut l’envisager d’emblée dans sa plus grande altérité. Il faut imaginer les échos du cerf qui brame dans le soir tombant sur les bois de la forêt de Bialowieza, les nuées de grues cendrées remontant vers le nord, le vol d’un aigle royal au-dessus du massif des Écrins. Il faut avoir vu cela, ne serait-ce qu’en pensée, ne serait-ce qu’en rêve, pour ne pas se laisser convaincre par ceux qui assurent que la nature est morte et que le mieux qu’il nous reste à faire, pour nous et pour la planète, serait de jardiner intelligemment un monde devenu totalement nôtre. »

    Virginie Maris : La Part sauvage du monde ; Seuil, 2018

  • Extrait

    Cet indicible ailleurs…

    “Lorsque nous nous immergeons dans un lieu qui nous submerge dans ce sentiment indéfini d’ailleurs, un trouble nous envahit au point que survient cette question : de quel côté de notre vie réside le rêve et de quel côté le réel trouve-t-il vraiment existence ?

    Libre à nous de penser que le réel s’impose d’abord dans toutes nos obligations journalières auxquelles notre société nous soumet artificiellement et que notre plongée dans l’état primaire d’une nature est un rêve que nous ne parviendrons pas à maintenir dès le retour dans notre quotidien professionnel, urbain, et familial ; ou bien, libre à nous de penser que la civilisation dont nous nous sommes si temporairement extirpés, n’est qu’un rêve collectif fermé sur lui-même, en dérive autiste à l’égard du monde, et que oui ! Le Réel est bien dans cette poétique de l’insaisissable que nous respirons à la première effluve sauvage d’un paysage étranger à l’humain.

    Libre à nous ! 

    Malheureusement avec cette liberté nous n’avons eu de cesse de surévaluer le réel de nos préoccupations quotidiennes, et par voie de conséquence, de dévaluer ce qui peut nous relier à un réel bien plus fondamental ; un réel notamment perceptible dans cet indicible ailleurs qui survit en quelques dernières contrées sauvages, qui sanctuarisent encore en elles toute l’essence première du monde ; une essence depuis si longtemps dérobée de nos vies !”

    Bernard Boisson : Nature primordiale ; Apogée, 2008

  • CITATION

    Un monde véritable.

    « Nos pieds veulent marcher dans l’herbe fraiche. Nos jambes veulent courir après les cerfs et serrer le ventre des chevaux ; battre l’eau derrière nous pendant que nous écarterons le courant avec nos bras.

    Par tout notre corps nous avons faim d’un monde véritable. »

    JEAN GIONO
    Rondeur des Jours
  • CITATION

    J’ai l’infini à ma portée…

    « J’ai l’infini à ma portée, je le vois, je le sens, je le touche, je m’en nourris et je sais que je ne pourrai jamais l’épuiser. Et je comprends mon irrépressible révolte lorsque je vois supprimer la nature : on me tue mon infini. »

    ROBERT HAINARD
    Et la nature ?
    1943