• POÉSIE

    The Summer Day

    Qui fit le monde ?

    Qui fit le cygne et l’ours noir ?

    Qui fit la sauterelle ?

    Je veux dire, cette sauterelle_

    Celle qui a bondi hors de l’herbe,

    Celle qui mange du sucre au creux de ma main,

    Qui bouge ses mandibules de gauche à droite,

    plutôt que de haut en bas_

    Qui regarde autour d’elle avec ses énormes yeux compliqués.

    Maintenant, elle lève ses pâles avant-bras et se nettoie soigneusement la tête.

    Maintenant, elle déploie ses ailes et s’envole au loin.

    Je ne sais pas exactement ce qu’est une prière.

    Je sais comment centrer mon attention, comment tomber dans l’herbe, comment m’agenouiller dans l’herbe, comment flâner et être comblée, comment errer à travers les champs,

    ce que j’ai fait tout au long de la journée.

    Dis-moi ce que j’aurai dû faire d’autre ?

    Est-ce que tout ne finit pas par mourir, trop rapidement ?

    Dis-moi ce que tu entends faire de ton unique, sauvage, et précieuse vie.

    MARY OLIVER

    ‘The Summer Day’ ; House of light ; 1990

    Photo : www.jessicabuczek.com

  • Non classé

    La part sauvage du monde.

    Bison bonasus – Bison d’Europe dans la forêt de Białowieża, en Pologne.

    « Notre pari, c’est que pour reconnaître et respecter la part sauvage du monde, y compris dans ses manifestations les plus quotidiennes, il faut l’envisager d’emblée dans sa plus grande altérité. Il faut imaginer les échos du cerf qui brame dans le soir tombant sur les bois de la forêt de Bialowieza, les nuées de grues cendrées remontant vers le nord, le vol d’un aigle royal au-dessus du massif des Écrins. Il faut avoir vu cela, ne serait-ce qu’en pensée, ne serait-ce qu’en rêve, pour ne pas se laisser convaincre par ceux qui assurent que la nature est morte et que le mieux qu’il nous reste à faire, pour nous et pour la planète, serait de jardiner intelligemment un monde devenu totalement nôtre. »

    Virginie Maris : La Part sauvage du monde ; Seuil, 2018

  • Extrait

    Cet indicible ailleurs…

    “Lorsque nous nous immergeons dans un lieu qui nous submerge dans ce sentiment indéfini d’ailleurs, un trouble nous envahit au point que survient cette question : de quel côté de notre vie réside le rêve et de quel côté le réel trouve-t-il vraiment existence ?

    Libre à nous de penser que le réel s’impose d’abord dans toutes nos obligations journalières auxquelles notre société nous soumet artificiellement et que notre plongée dans l’état primaire d’une nature est un rêve que nous ne parviendrons pas à maintenir dès le retour dans notre quotidien professionnel, urbain, et familial ; ou bien, libre à nous de penser que la civilisation dont nous nous sommes si temporairement extirpés, n’est qu’un rêve collectif fermé sur lui-même, en dérive autiste à l’égard du monde, et que oui ! Le Réel est bien dans cette poétique de l’insaisissable que nous respirons à la première effluve sauvage d’un paysage étranger à l’humain.

    Libre à nous ! 

    Malheureusement avec cette liberté nous n’avons eu de cesse de surévaluer le réel de nos préoccupations quotidiennes, et par voie de conséquence, de dévaluer ce qui peut nous relier à un réel bien plus fondamental ; un réel notamment perceptible dans cet indicible ailleurs qui survit en quelques dernières contrées sauvages, qui sanctuarisent encore en elles toute l’essence première du monde ; une essence depuis si longtemps dérobée de nos vies !”

    Bernard Boisson : Nature primordiale ; Apogée, 2008

  • CITATION

    J’ai l’infini à ma portée…

    « J’ai l’infini à ma portée, je le vois, je le sens, je le touche, je m’en nourris et je sais que je ne pourrai jamais l’épuiser. Et je comprends mon irrépressible révolte lorsque je vois supprimer la nature : on me tue mon infini. »

    ROBERT HAINARD
    Et la nature ?
    1943